C’est justement pour enrayer cette dynamique que la FIFPRO Europe et European Leagues, qui représentent respectivement les syndicats de joueurs et les ligues nationales européennes, et LaLiga espagnole ont déposé une plainte contre la FIFA auprès de la Commission européenne en octobre dernier. Elles estiment que "l’imposition par la FIFA de décisions sur le calendrier international constitue un abus de position dominante et viole le droit de l’Union européenne".
Par la voix de leurs syndicats, les joueurs reprochent donc à la FIFA d’augmenter le nombre de rencontres par saison sans les consulter et en méprisant les directives européennes en matière de santé et de sécurité des travailleurs. "À la FIFA, ils se foutent de tout, confiait le président de la FIFPRO Europe David Terrier à L’Équipe en septembre dernier. Ils décident de tout unilatéralement. Mais où ça va s’arrêter dans l’incohérence ? La saison à venir (cette saison, ndlr) va être la pire de l’histoire pour les top players. On n’a pas de représentants de joueurs, on n’a pas de voix et on n’a pas de poids à la FIFA. C’est une réalité. On n’est pas écouté."
La FIFA se croit par moments un peu au-dessus des lois, ce n’est pas évident de négocier
Cette plainte fait suite à une autre, déposée auprès du Tribunal de Commerce de Bruxelles. Selon David Terrier, la réforme du Mondial des clubs a constitué "la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Tout a été déé en termes d’irrespect des lois, de pouvoir décisionnel car seuls la FIFA et les clubs ont décidé des règles, du droit du travail, des conventions collectives." Architecte des compétitions européennes (Euro, Ligue des Nations, Champions League, Europa League et Conference League), l’UEFA opte pour plus de concertation et bénéficie donc de la clémence des syndicats.
Responsable de la cellule foot d’United Athletes, Sébastien Stassin appelle également la FIFA et l’UEFA à revoir leur copie. "C’est tout le système international qui doit changer. Mais il ne changera pas, car ces instances veulent faire de plus en plus d’argent. La FIFA est un organe qui se croit par moments un peu au-dessus des lois et ce n’est donc pas évident de négocier avec eux. Mais il faut trouver des solutions : il y a tellement de joueurs internationaux qui font des milliers de kilomètres avec leur équipe nationale et puis qui rentrent en club et jouent le jour d’après en compétition… Le repos physique et mental n’est pas présent chez ces personnes."
Pour appuyer ses revendications, la FIFPRO recense scrupuleusement la charge de travail des footballeurs professionnels, condensés dans ce rapport, illustrent bien la pression exercée sur les joueurs internationaux en Amérique, Asie, Afrique ou Océanie et actifs dans un club européen. Sur cette période, le défenseur de Tottenham et international argentin Cristian Romero avait par exemple parcouru 162.978 kilomètres au-delà des frontières, soit plus de quatre tours du monde, pour exercer son métier. Après être monté au jeu durant le match Iran-Japon à la Coupe d’Asie des Nations le 3 février 2024, Takumi Minamino avait fait de même… à Monaco, le lendemain en Ligue 1. Le Hondurien Alexander López était pour sa part le champion des matches trop rapprochés : il en avait enchaîné 19 au rythme de deux par semaine avant de pouvoir souffler un peu.